LE TEMPS DE DIEU
Je me comme Kra Foua Pacôme. J’ai eu un parcours scolaire brillant. Premier de
classe du primaire au secondaire, j’ai obtenu mon baccalauréat en série C avec
la mention Bien. Après 4 ans d’étude de management dans une grande école de la place,
je me suis envolé pour la France où j’ai passé une année entière à étudier le
marketing. Mon diplôme de Master en poche, je suis revenu à Abidjan, la tête
plein de rêves.
Je me suis vite retrouvé confronté à la triste réalité. Aucun
travail ! Partout, le chômage sévissait en despote. J’étais cerné. Les
portes du travail m’étaient hermétiquement fermées. Si je n’étais pas jugé trop
qualifié pour le poste, c’était l’expérience professionnelle qu’on disait me
faire défaut. On se demande bien comment acquérir une expérience
professionnelle si aucune entreprise ne veut vous donner une chance ?
Chaque jour, j’écumais les rues du Plateau, le quartier administratif, usant
mes semelles. Je perdis le beau teint basané avec lequel j’étais revenu
d’Europe.
Deux années entières sont passées. Toujours rien.
Le malheur des uns fait toujours le bonheur des autres. Nombreux étaient ceux
qui se gaussaient de moi et riaient de mes déboires. Les « ça va
aller » m’agaçaient, tout comme les « ne te décourages pas » qui
m’horripilaient. Couché sur mon lit, insomniaque, je passais des heures à
ressasser les souffrances que ma chère mère avait endurées. Elle avait épuisé
toutes ses économies dans mon éducation et était à deux doigts de la retraite.
Même si elle ne se plaignait pas, je m’en voulais de ne pouvoir m’occuper
d’elle.
Je m’étais promis de prendre soin de ma mère. Mon seul but était de la couvrir de milles
et une attentions, depuis que j’avais été en âge de comprendre que mon
père nous avait lâchement abandonné, pour une fille plus jeune.
La réponse à mes nuits d’insomnies m’apparu clairement, un après-midi, dans un
transport en commun. Les deux passagères qui occupaient les sièges justes avant
le mien, discutaient à voix basse en langue Tagbana. J’ai prêté l’oreille. C’était ma langue
maternelle et je la comprenais parfaitement. Elle parlait d’un puissant
féticheur originaire du Nigéria. J’ai redoublé d’attention. Ce devin et grand
« jujuman », pouvait détecter les problèmes qui minaient votre vie et
y apporter un remède. Quelques années auparavant, j’aurais repoussé avec dédain
cette option. Mais là, tous les moyens étaient bons pour que ma mère soit fière
de moi. J’ai retenu mentalement l’adresse.
Dans la même semaine, je me suis rendu au lieu indiqué. Le monde qu’il y avait me
conforta dans l’idée que ce « jujuman » était très puissant. Des
voitures luxueuses, des tous derniers modèles, étaient stationnées devant la
petite cour où le féticheur avait installé ses quartiers. Après environ,
3heures d’attente, mon tour est enfin arrivé. J’ai pénétré, la peur au ventre,
dans l’antre du féticheur. J’ai gardé les yeux fixés sur le petit homme
grassouillet, au crâne dégarni. J’avais peur de prendre la fuite si mon regard
trop baladeur croisait quelque chose d’effrayant.
Je n’ai pas eu à parler, il m’a détaillé l’objet de ma venue et m’a expliqué la
solution à mon problème. Et je ne devais débourser que 150.000 F CFA !
J’ai remué ciel et terre. J’ai trouvé l’argent pour qu’il fasse les
sacrifices qui s’imposaient et conjure le mauvais sort. Dans la même semaine,
j’ai reçu le coup de fil d’une société prestigieuse. Je devais commencer le
travail la semaine prochaine. Ma vie allait changer du tout au tout ! Ce
n’était pas un petit travail ! On parlait ici de maison de fonction, de
voiture de fonction et de multiples autres avantages en nature. Sans compter le
salaire qui était plus que confortable. J’allais devenir un boss !
C’est alors que ma mère est tombée malade ; gravement malade. C’étaient des
vomissements intempestifs. C’étaient des boutons sur tout le corps. C’étaient
des malaises incompréhensibles. J’étais
hébété, désemparé. Les médecins avouaient leur impuissance. Je me suis précipité chez
le féticheur. Il m’a regardé droit dans les yeux et m’a demandé si j’étais
vraiment aussi naïf que j’en avais l’air. C’était ma mère ou la richesse !
Selon lui, c’était une sorcière redoutable qui bloquait mes bénédictions et ma
réussite.
Je n’arrivais pas à le croire.
C’était tout bonnement impossible. Ma mère était la
douceur incarnée et la bonté personnifiée. Qu’auriez-vous fait à ma
place ?
J’ai revu toute ma vie défiler. J’ai revu tout ce que ma mère
avait fait pour moi. Mère célibataire malgré la présence d’un mari fainéant à
ses côtés. Mère pauvre, malgré une famille nantie qui n’avait pas supporté
qu’elle désobéisse et épouse un étranger. Non, c’était impossible qu’elle me
veuille du mal. Si je mourrais d’envie de devenir un homme important, riche et
puissant, c’était pour que ma mère soit fière de moi. C’était pour que ma mère
connaissent l’opulence avant de passer de vie à trépas. J’ai demandé au
« jujuman » de tout arrêter. Je tenais trop à ma mère. Je préférais
mourir dans le chômage que de faire du mal à celle à qui je devais le peu que j'avais.
Le
féticheur goguenard, a secoué la tête.
«Tu penses que tu es au marché ici ! Il n’y a aucun retour en arrière possible. Le destin de ta mère est déjà scellé ! A moins que les Dieux change d’avis. Pense plutôt à ta nouvelle vie. ».
«Tu penses que tu es au marché ici ! Il n’y a aucun retour en arrière possible. Le destin de ta mère est déjà scellé ! A moins que les Dieux change d’avis. Pense plutôt à ta nouvelle vie. ».
J’ai failli le frapper, mais je me suis retenu. Ce n’était pas de sa
faute. C’était moi qui m’étais mis dans ce pétrin. J’ai couru comme un fou
jusqu’à la première église que j’ai croisé. C’était une église évangélique.
J’ai expliqué mon problème et ils m’on dirigé vers le pasteur. C’était un homme
très connu dont je voyais souvent les affiches à travers la ville. Il a prié
pour moi et m’a demandé de laisser mon numéro de téléphone.
Après un jeûne de trois jours, ils sont arrivés chez nous, dans notre petite maison
de Plateau Dokui, lui et une équipe de six personnes. La séance de délivrance a
été houleuse. Ils ont fini par me demander de venir avec ma mère dans leur
église. J’avais carrément oublié le travail que je devais débuter. Je n’y ai
d’ailleurs pas mis les pieds. Ma mère était ma seule préoccupation. Son
état se stabilisait, empirait brusquement, puis s’améliorait. J’étais dans un
grand désarroi. Et un matin, c’était fini. Totalement restaurée, totalement guérie,
ma mère avait recouvré la santé.
Quand j'ai été convaincu de la guérison de ma mère, j’ai
fondu en larmes. Je me suis confondu en remerciements. Ma mère et moi, nous nous sommes convertis.
Aujourd’hui, riche homme d’affaires, je suis à la tête d’une société
florissante. C’est l’église qui m’a aidé dans mes débuts grâce à leur fond social. La société qui avait
voulu m’embaucher a fermé deux mois. Ce que le
Diable donne n‘est vraiment pas durable. Ma mère voyage aux quatre coins du
monde, tout frais payés par moi, bien sûr ! Elle est une commerçante
prospère et mène une vie très confortable. Elle m’a pardonné mon erreur et me harcèle
à présent pour que je me marie. Mais j’attends patiemment le temps de Dieu, car c’est bien le meilleur temps.
J´ai aimé!un scénario avec ne serait pas mal.
RépondreSupprimernanok120
Je suis open à toutes proposititions! lol! Merci @nanok120
RépondreSupprimertop!ça conseille en plus
RépondreSupprimerMerci @ Nina!
RépondreSupprimerBRavo!!! belle histoire, on aurait aimer avoir plus de details de la délivrance (j´aime les histoires...)Vraiment un pacte avec le Diable peu nuire toute une vie sur terre!.
RépondreSupprimerMerci @Mixya! Tous les moyens ne sont pas bons pour obtenir la richesse! Désolée pour les détails! Next Time maybe!
RépondreSupprimerj'adorrrrre tes petites histoires yehni. Je les lis en retard mais chaque fois que j'en ai l'occasion je m'en délecte... Pardon informe moi chaque fois que tu en publies.
RépondreSupprimerMerci @Kitou! Je ne manquerai pas de t'informer! Bisou
RépondreSupprimerJ'ai bien aimé ton histoire; Cependant je pense que la guerison de la mere n'est pas bien expliqué et gagnerai à etre etoffé pour rendre l'histoire meilleure.
RépondreSupprimerporte toi bien et que Dieu te bnisse DJIDJI (comme oridjidji?)
Il va falloir que je fasse un article pour expliquer l'origine de mon nom hein! La guérison de la mère est liée à la prière mais si tu penses qu'elle n'est pas assez étoffée, il y a certainement d'autres qui le pensent aussi! J'approfondirai dans la compile des petites histoires de yehni que je ferai bientôt!
RépondreSupprimerMerci!!