Article paru dans l'intelligent d'Abidjan du 28 Novembre 2012
J’ai lu avec amusement l’extrait de l’article d’un « journaliste » offusqué
par la nouvelle loi sur le mariage votée à l’Assemblée nationale
ivoirienne. Il arguait que la majorité des femmes étaient analphabètes
et ne sauraient même pas quoi faire de cette nouvelle puissance
que l’Etat leur offrait sur un plateau d’or. C’est « comme un trésor
dans les mains d’un enfant qui ne peut s’en servir ».
Ces phrases bien que choquantes m’ont fait sourire. Oui, le taux
d’analphabète est important dans la gent féminine, mais à qui la
faute ? Qui estime que la jeune fille serait d’une aide plus importante
à la cuisine qu’en classe ? Qui décrète qu’elle devrait se préparer à
assumer le rôle d’épouse soumise au lieu de « faire du tourisme »
sur les bancs de l’école et jeter ainsi de l’argent par la fenêtre ? Ce
sont les hommes.
Certains hommes peu confiants en leur autorité, ont décidé de maintenir
la femme en position d’infériorité. Ils vivent dans la crainte perpétuelle
de descendre de leur piédestal. Ils crient « une femme chef
de famille ? Sacrilège ! » plus fort que les autres. J’ai peut-être mal
compris, mais ne plus mentionner expressément que l’homme est le
chef de famille ne le dépouille pas automatiquement de ses attributs.
Cela ne sacre pas non plus la femme, nouveau chef de famille.
La femme et l’homme ont chacun leur place dans la société et dans
le couple sans que l’un ait à se tenir sur la tête ou les pieds de l’autre.
De plus, « un bon chef est celui qui se met au service des autres »
m’a-t-on appris. Cela implique bien entendu d’écouter l’autre, de tenir
compte de son avis et de ses besoins. En quoi donc la nouvelle loi
gênerait celui qui était un bon chef ? Surtout qu’elle demande à présent
expressément à la femme de contribuer financièrement à la
gestion du couple si elle en a les moyens.
La relation entre l’homme et la femme ne débute pas devant le maire.
Elle se construit petit à petit avant qu’il n’y appose la marque de
la légalité. Et les premiers fondements de cette construction ne sont
pas les lois votées en assemblée, mais bien l’amour et les règles que
les conjoints se fixent à deux. Ce sont ces règles qui régissent leurs
rapports quotidiens avant et après le mariage. Pourquoi ce branlebas
de combat ? On parle d’atteinte à la culture mais quelle culture
exactement ? « Autrefois, chez nous les femmes étaient exemptées
de tous les travaux physiques. C’était le « sexe fort » qui cassait les
fagots de bois par exemple, faisait les travaux champêtres, et pilait
même la banane. Les choses ont bien évolué. Essayez un peu de demander
à votre époux de venir piler le foutou…. » expliquait une
sexagénaire.
Dans cette culture, comme dans beaucoup d’autres, les
choses ont changé… au détriment de la femme. C’est donc une entreprise
louable que de vouloir lui donner plus d’importance.
Toutefois, la communication est l’une des clés de la facilitation du
changement. Or celle entourant la nouvelle loi sur le mariage n’a
pas été bien menée. Du jour au lendemain, le ciel tombe sur la tête
des hommes, sans préavis aucun. Un gouvernement est emporté et
la nouvelle loi sur le mariage est quand même votée dans la foulée.
C’est trop soudain et les réticences masculines voire même féminines
sont compréhensibles.
Si on ne veut pas jouer la comédie du modernisme mais qu’on veut
impulser un réel changement dans les moeurs et dans la condition de
la femme pourquoi cette précipitation ? Il aurait fallu, face à la polémique
soulevée, expliquer et sensibiliser. Sinon avec les interprétations
multiples, j’ai bien peur que la loi sur le mariage fasse plus de
mal que de bien à la famille, noyau de la société.
En outre, on soupçonne les nouveaux textes de faire une brèche au
mariage homosexuel. Attention au revers de la lame.
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