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mardi 12 juin 2012

LES PETITES HISTOIRES DE YEHNI N°19

MON MAÎTRE, MON AMI


"Qu’est-ce qui ne va pas mon ami ? Tu es bien calme ces derniers temps." 

Je ne sais pas quoi répondre à mon maître. Je l’aime et je n’ai pas envie de le faire souffrir. Et certainement, lui jeter à la figure que sa femme le trompe serait comme la flèche d’un chasseur en plein cœur. Il m’appelle son ami parce que nous vivons ensemble depuis plusieurs années déjà. Quand je suis arrivé chez lui, j’étais encore très jeune. Il m’a enseigné tout ce que je sais de la vie et je suis fier de sillonné le canton à ses côtés, dans sa vieille Jeep.

J’étais avec lui bien avant que cette méchante femme n’arrive. Avec son teint de papaye gâtée, ses œillades d’hyènes fourbes, son sourire calculé, elle avait réussi à séduire mon maître qui l’avait épousé.  A peine arrivée, elle voulait mon départ. 
« Je ne sais pas pourquoi tu continues à le garder ici ! » disait-elle à chaque fois qu’elle en avait l’occasion. Je peux très bien dire la même chose d'elle. Je ne sais pas pourquoi mon maître continue à la garder. Quand elle se maquille au lieu d'embellir, elle ressemble à une Guenon. 



Quelle réponse donner à mon ami? Aucune idée. Si je lui avoue tout, je serai alors obligé de lui dire que j’ai surpris sa femme, dans les bras de Monsieur Abougou, le gros Abougou, celui qui sent la fiente de cabri, alors que j’étais caché sous son lit attendant le bon moment pour le voler. J’étais muselé par mon propre péché. Le pire c’est que je ne suis pas venue chaparder un objet de grande valeur. C’est une bouteille pleine d’une liqueur sucrée et piquante, que mon maître et moi adorons, que je venais subtiliser. Il la cachait sous une pile de vêtements dans un tiroir, juste à côté de la boîte pleine de gâteaux au coco que son docteur lui avait interdit de manger. Il connaissait mon faible pour ces deux mets et les dissimulaient pour être sûr que je n’allais pas en abuser. Nous en buvions un peu, chaque Dimanche, après l’église, assis à l’ombre des arbres. Bien entendu son verre était rempli à ras bord quand le mien contenait à peine quelques gouttes. Cela réussissait juste à me frustrer. Une fois déjà j'étais venu étancher ma soif. J'avais brisé la bouteille et la pauvre petite servante avait fait les frais de ma maladresse. Je le reconnais, je n'ai pas dit que j'étais le coupable. 

Ce jour-là donc, ce jour maudit où j'ai surpris madame "papaye gâtée" et monsieur "gros ventre", mon ami  m’avait appelé et cherché avant de partir se promener dans sa vieille jeep, en vain. J’étais bien caché sous son lit, attendant les signaux pour assouvir mon envie. Les signaux, ce sont les trois tentatives avant le démarrage effectif de la voiture puis le bruit des pneus roulant sur le sol granuleux en faisant un « crr crr crr » incommodant. 

Première tentative, deuxième, troisième, crissement de pneus. J’étais sur le point de quitter mon refuge quand j’ai entendu des pas dans le couloir. 

"Fais vite, je ne sais pas combien de temps il sera absent." 

Madame est entrée avec Monsieur Abougou, le gros Abougou qui dégouline de sueur aux effluves d’ail dès qu’il fait quelques pas. Cet Abougou dont le ventre gras tend disgracieusement ses vêtements. Abougou à la tête comme un morceau de brique qu’il coince tant bien que mal dans une casquette noire. C’est celui-là que la femme de mon maître a choisi. Je savais bien qu’elle n’avait pas de classe mais je venais de découvrir qu’elle n’avait pas de goût non plus. Même moi j'étais répugné par Abougou. Je ne voyais pas leur visage mais leurs pieds. J’entendais aussi leur voix. 

Caché sous le lit donc, j’ai écouté pendant des minutes interminables la cacophonie bruyante de leur trahison. Quand ils ont été rassasié, ils ont rejoint le jardin où, assis sous les arbres, à la place que mon maître et moi affectionnons, ils ont fait semblant de se concentrer sur les secrets dissimulés dans la parole de Dieu. Abougou est catéchiste. Avant, je pensais que madame était tellement stupide qu’il lui fallait un répétiteur même pour comprendre les mystères de Dieu. Ce jour-là, j’ai découvert que c’était le chemin large et spacieux qui conduisait en enfer que le catéchiste et son élève explorait. 

Non, je ne dirai rien à mon maître. Je peux juste faire en sorte qu'il les surprenne, mais comment? Il a du mal à me comprendre. J'ai décidé de le venger à ma manière. Depuis que j'ai lancé la campagne à la fois punitive et dissuasive, Abougou espace ses visites. Mais madame me lance des regards meurtriers. J'ai peur de manger la nourriture qu'elle me sert. Je sais qu'elle est capable de m'empoisonner. Je me nourris du fruit des arbres de la cour ou alors je vais manger chez la soeur de Monsieur qui n'habite pas très loin. Les fruits me donnent des coliques et c'est tant mieux. Je peux donc continuer d'uriner et de déféquer dans les chaussures ou le chapeau de Abougou sans trop d'effort. Je laisse parfois traîner des épines sur le chemin de madame qui aime bien marcher nu pieds. 
Même si cela doit me valoir toutes ses injures et ses menaces: 
"Saleté de singe de malheur ! Je te cuirai un jour ! Tu ne perds rien pour attendre ! "

Je suis bien décidé à défendre l'honneur de mon maître, mon ami.

photos: poneylandblog.com

7 commentaires:

  1. Très belle peinture du paysage de tromperie qui règne dans certains couples.

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  2. Aucun homme africain digne de ce nom accepterait que sa femme le trompe sans vergogne,chose inconcevable pour lui.

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  3. tu es la meilleure Yehni, beaucoup de courage et plein succès dans tous tes projets.

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  4. Belle histoire et belle personnification du singe

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  5. Super, il y a simplement des petites erreurs :
    « Je ne sais pas pourquoi tu continues *de le garder ici
    Je ne sais pas pourquoi mon maître continue *de la garder

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    1. Ah, j'avoue que cette fois, je ne vois pas les erreurs, instruis moi please !

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  6. Bonjour Yehni, à quand le N°20? Je suis si impatiente de te lire...

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